Assortiment bref de trucs intéressants — 15 mars 2019
Cette semaine: un roman de fiction spéculative d'Aliette de Bodard, un essai de Lindsay Nixon, Fierce Femmes and Notorious Liars de Kai Cheng Thom, un regard très critique sur le contexte québécois de la journée internationale des droits des femmes d'Émilie Nicholas, et encore plus!
(J'ai passé la majorité de la semaine dernière à travailler hors de la maison à cause de problèmes causés par notre bel hiver inconsistant, incluant une panne d'électricité recouvrant le Plateau en entier! Donc la photo de couverture en haut a été prise dans un des Anticafés ici à Montréal où j'ai passé la journée avec mon amie Goatbunny pour l'internet et charger mon ordi...)
Toutes les deux semaines pendant 2019, je publie une courte liste de quelques articles/blogues/vidéos YouTube/livres/musique/jeux que j’ai trouvés de remarquable ou d'intéressant. Voici ce que j'ai lu entre le 1 et le 15 mars 2019.
J'ai lu un roman de fantaisie post-apocalyptique d'Aliette de Bodard situé dans les ruines gothiques de Paris, un essai sur l'éthique de miner le trauma pour la littérature de Lindsay Nixon, l'inimitable Fierce Femmes and Notorious Liars de Kai Cheng Thom, un regard très critique sur le contexte québécois de la journée internationale des droits des femmes d'Émilie Nicholas dans Le Devoir, un film-collage de 2 heures sur le Montréal des années 50 du cinéaste Luc Bourdon, ainsi que deux essais vidéos sur la masculinité toxique dans la culture geek et STEM examiné à travers l'émission The Big Bang Theory.
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The House of Shattered Wings d'Aliette de Bodard (2015)
Rêves-tu d'un livre recueillant le «vibe» du film surnaturel Underworld et Le paradis perdu de John Milton? Ce roman d'Aliette de Bodard, le premier de la série Dominion of the Fallen, est non seulement un mélange thématique réussi mais comprend également une conscience coloniale éveillée qui fonctionne vraiment bien. Aliette de Bodard est une écrivaine vietnamienne et française et ce livre célèbre ce fait à travers son protagoniste Philippe, un ancien sujet colonial vietnamien qui est enlevé de son pays et égaré dans un Paris qui s'écroule, forcé de s'impliquer dans les machinations célestes de créatures qui sont aussi ses anciens adversaires. Bien que je trouve que le rythme de lecture souffre un peu dans le dernier quart du livre, il y a beaucoup de brillance imaginative dans ce roman et j'ai déjà commandé le prochain tome de la série.
No, not a church. A cathedral, like the pink-hued edifice the French had built in Saigon. It was...like a knife blade slowly drawn across his heart: he could almost have been back home, expect that it was the wrong architecture, the wrong atmosphere, the wrong setting. He could still feel the fervor of it's builders, of its worshippers, swirling in the air: a bare shadow of what it had once been, but so potent, so strong, so huge.
"Notre Dame," Philippe whispered. (p. 40)
Trauma Ethics by Lindsay Nixon
Quelle est la différence entre l'écriture qui atteste un trauma et une écriture qui exploite un trauma?
Bon, première chose: ça m'a pris deux semaines pour finir la lecture de ce texte assez court de Lindsay Nixon parce que mes yeux ne pouvaient pas accepter le design lourd du blog du QWF. Mais le texte vaut lire jusqu'à la fin, même si tu n'es pas comme moi: super préoccupé par l'éthique de l'écriture des mémoires. Lindsay s'interroge sur l'éthique de puiser ses propres traumatismes (et ceux des autres) et songe la différence entre l'expression, le soulèvement, et l'exploitation dans la littérature.
(...) I’m no stranger to weighing the ethics of writing about myself, and my relations, embodying various forms of trauma. I’m especially conscious of the vulnerable states some of my Indigenous relations live in, a fact that remains ever in the back of my mind when I write creative non-fiction. I’m also interested in the role that audiences play in how trauma-based writing is received. I would argue, even, that the audience—the reader—has a great deal of responsibility in how Indigenous trauma is perceived.
Fierce Femmes and Notorious Liars: A Dangerous Trans Girl's Confabulous Memoir de Kai Cheng Thom (2018)
Une fois commencé, Fierce Femmes and Notorious Liars est un livre qui s'est laissé difficilement fermer! Après l'avoir terminé (plusieurs heures après minuit...) j'ai eu une forte envie de me trouver des cigarettes et de les fumer sur les escaliers de secours derrière notre immeuble, de regarder ce ciel sans étoiles et brumeux qui reflète la lumière nocturne de la ville.
Kai Cheng a réussi quelque chose de spectaculaire et merveilleux avec ce roman. J'ai passé la nuit à tenter de catégoriser le genre du livre — fantasie urbaine? réalisme magique? poésie? Parfois, juste un petit peu, le livre a suscité en moi le même émerveillement que j'ai éprouvé quand j'ai lu Travel Light de Naomi Mitchison pour la première fois. C'était comme plonger dans un rêve à moitié oublié — quelque chose d'intensément familier mais enchanté et envoutant.
J'aimerais beaucoup écrire plus sur ce roman superbe. Le sujet, la voix, le cadre (Montréal! Je te reconnais!) et surtout la fin. J'ai bien ri — un rire exorcisant !
Madame Pas-Tout-le-Monde d'Émilie Nicholas dans Le Devoir (7 mars 2019)
Va lire cet article. Il s'agit d'une réflexion absolument pertinente sur les enjeux féministes intersectionnaux (c'est-à-dire: conscient du racisme, du colonialisme, de l'homophobie et transphobie, du validisme, et encore plus) ici au Québec, et des échecs du féminisme institutionnel vis à vis ceilleux dans les marges, dont celles et ceux et ceilleux qui ne correspondent pas à une Madame Blanche de Classe Moyenne Valide et Cishetero.
Inversement, les enjeux qui touchent des femmes qu’on ne voit pas comme représentatives de la norme n’ont pas progressé autant au cours des dernières décennies. Le mouvement féministe québécois s’est rassemblé autour du leadership de francophones de la classe moyenne, et ce n’est bien souvent qu’à ces femmes que les partis s’intéressent. Les autres ne font en quelque sorte pas partie de « l’électorat » ou du « peuple ».
La mémoire des anges de Luc Bourdon
Cette lettre d'amour visuelle conçu par le cinéaste Luc Bourdon utilise des clips de plus de 120 films de l'Office national du film du Canada pour coudre un hommage de 2 heures à la ville de Montréal des années 50 et 60. Je l'ai pas complètement terminé, mais je voulais le partager quand même. Il est disponible en stream gratuitement sur le site de l'ONF: https://www.onf.ca/film/memoire_des_anges/. J'ai trouvé ce film particulièrement utile (même émouvant) car je suis en train de rassembler des notes et inspirations pour écrire un roman qui se passe à Montréal dans les années 50. À noter qu'il contient de nombreux images d'églises et d'écoles catholiques.
The Adorkable Misogyny of The Big Bang Theory par Pop Culture Detective
Et après la deuxième partie est ici. C'est vraiment dommage qu'ils n'existent qu'en anglais, car je trouve ces deux essais vidéos réussissent vraiment à vulgariser la masculinité hégémonique et le machisme (en anglais: «hypermasculinity»), deux fondements de la masculinité toxique. Les essais examinent comment la culture nerd et tech demeure toxique, et offre une explication exhaustive de la raison pourquoi j'ai arrêté de regarder le Big Bang Theory après la deuxième saison.
...Et c'est tout pour cette semaine! N'hésitez pas de me laisser un commentaire ici ou sur Twitter @gersandelf.