Concernant la correction des traductions automatiques
Depuis que je propose des services de traduction à mes client∙e∙s, la question qui m’est posée le plus souvent est si je corrige ou non les traductions automatiques effectuées grâce à des outils comme Google Translate ou Deepl, entre autres.
Depuis que je propose des services de traduction à mes client∙e∙s, la question qui m’est posée le plus souvent est si je corrige ou non les traductions automatiques effectuées grâce à des outils comme Google Translate ou Deepl, entre autres.
Ma réponse est: mouais, peut-être.
La question implique de nombreux facteurs. Chaque traductrice approche la question différemment, et de nombreuses traductrices professionnelles indépendantes refusent catégoriquement de corriger les traductions automatiques, et je comprends parfaitement pourquoi.
Le fait est qu’un assez grand nombre de client∙e∙s pensent que demander à une éditrice ou à une traductrice de corriger les traductions automatiques leur permettra d’économiser car iels n’auront pas à accepter le tarif traditionnel de traduction « par mot ». Malheureusement, certain∙e∙s client∙e∙s s'attendent à trouver des correctrices qui feront ce travail pour un salaire bien inférieur au salaire minimum (du moins selon les normes québécoises), car trop d'agences de traduction offrent de faibles rémunérations pour ce genre de travail minutieux et difficile.
Comme le montre l'image de cette bouteille, il est primordial que de réels yeux humains examinent votre produit dans son contexte complet avant sa mise sur le marché. Bien que l’on puisse se dire qu'il n’existe pas de mauvaise publicité, en vérité il n'y a pas de meilleur moyen d'insulter un groupe démographique cible que de très mal traduire les étiquettes dont iels ont besoin pour évaluer si votre produit leur convient. En plus, c’est particulièrement important pour les listes d’ingrédients, dont l’exactitude est nécessaire pour que les consommat∙rice∙eur∙s puissent vérifier que le produit ne contient par d’allergènes, ainsi que pour d'autres raisons semblables liées à la santé et à l’accessibilité.
Et donc nous abordons le noyau du problème avec les traductions automatisées. C'est une chose de demander à une traductrice ou réviseure (ou même à quelqu’un qui ne travaille pas dans le domaine mais dont la langue cible est leur langue maternelle) de jeter un coup d'œil rapide sur une étiquette, et c'en est bien une autre de s'attendre à ce que cette personne corrige les traductions automatiques de textes complexes, techniques ou longs. De nombreux outils de traductions automatiques accessibles au public tels que Google Translate ou Deepl sont beaucoup plus sophistiqués qu'ils ne l'étaient auparavant. Et je suis tout à fait de l’avis que ce sont des outils très utiles pour des fins éducatives ou d’accessibilité (comme, par exemple, pour permettre à une lectrice de lire un texte rédigé dans une langue qu’elle ne lit pas). Mais cette sophistication est encore superficielle, et incapable de prendre en compte des facteurs tels que le contexte, le public et, souvent, les registres de ton. Les outils de traduction automatique sont capables de créer un texte qui ressemble et sonne comme du vrai français ou de l'anglais (les deux langues dans lesquelles je travaille) à une personne ayant une connaissance passagère de l'autre langue. Trop souvent, le résultat de la traduction automatisée contient une signification différente du texte original. De plus, les phrases ou les paragraphes peuvent être difficiles à lire ou peu clairs dans leur ensemble, et doivent être retaillés de manière significative pour redevenir lisibles.
Cela signifie souvent que la correction des textes traduits automatiquement prend plus de temps qu’une traduction tout court, et ça peut même prendre plus de temps que la correction des tentatives d’une cliente qui se débrouille dans la langue mais pas au niveau requis. Ce qui est problématique si on n'est payé qu'une fraction de ses honoraires habituels pour ce qui finit par être un travail plus long.
Donc, dans ma propre pratique, c'est vrai que j'accepte parfois de corriger des petits textes traduits automatiquement (sauf tout matériel relevant de la traduction créative comme des slogans, des noms de produits ou d'événements, par exemple) à un taux horaire qui reflète la quantité de recherche, le souci du détail et la lecture attentive qu'implique ce type de travail. Mais de plus en plus, et surtout lorsqu'il s'agit de documents plus longs, j'explique aux client∙e∙s potentiel∙le∙s que le taux horaire de correction des traductions automatisées finit presque toujours par éclipser mon taux de traduction habituel, et qu'il vaut beaucoup mieux embaucher une traductrice humaine pour exercer son expertise et pratiquer son métier.